Résumé de la thèse
La rhétorique qui naît au Ve siècle avant J.-C. est un phénomène social, politique et éducatif qui occupe une place centrale dans la réflexion platonicienne. Touchant la question de la persuasion des masses, ce nouvel usage de la parole en vigueur à Athènes est condamné par Platon dans le Gorgias, dialogue connu pour son intensité et le ton parfois violent de ses échanges. Dans cette oeuvre, Socrate fait face au célèbre rhéteur Gorgias, à son disciple Pôlos et à l’ambitieux Calliclès. Ces personnages considèrent la rhétorique comme une arme permettant d’assurer leur puissance dans la cité démocratique. Or, dans la littérature secondaire, on a longtemps réduit le Gorgias à une simple critique de la rhétorique, jugeant que son usage philosophique était seulement envisagé et théorisé à partir du Phèdre et des Lois. L’originalité du présent travail est de démontrer que la puissance du Gorgias tient, au contraire, dans le fait qu’il articule à la fois l’appréhension du nouveau phénomène que représente la rhétorique, sa critique et sa refondation par le philosophe idéal, Socrate, tout en apportant un nouvel éclairage à l’histoire d’Athènes. Ce faisant, Platon réalise une véritable appropriation philosophique de cette modalité particulière de s’exprimer, en proposant à la fois sa théorisation dialectique et une démonstration de son usage de manière directe, en l’utilisant comme un remède pour soigner le personnage le plus récalcitrant du dialogue, Calliclès. C’est en combinant une lecture immanente du dialogue à un éclairage interdisciplinaire que cette thèse démontre la contribution décisive du Gorgias au renversement dialectique de la rhétorique chez Platon.
Thèse inscrite au tableau d'honneur de l'Université Laval.